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Violences politiques -GUINEE-

5 novembre 2009 4 05 /11 /novembre /2009 14:15

 
  La Fédération des associations de la jeunesse guinéenne (Fajeg), est une organisation créée en Août 2007. Sa mission est de prôner la non-violence à travers les sensibilisations de la couche juvénile. Elle se bat également pour l’implication des jeunes dans le processus de démocratisation de la Guinée. Ce mouvement qui compte une trentaine d’associations de jeunes en son sein, a entamé le 28 octobre dernier, une grève de la faim de cinq jours. Le mouvement qui se voulait pacifique a été interrompu par la junte dès le premier jour. Les membres déposés au Camp Alpha Yaya Diallo, Qg du Cndd, ont subi des interrogatoires pas très courtois. Dans cet entretien exclusif, le président de cette fédération revient sur le parcours du combattant effectué par les membres de l’organisation.

«Les soldats nous ont forcés à manger du pain et du corn-bœuf»


 Vous venez d’organiser une grève de la faim qui s’est soldée par des interpellations de la junte. Que s’est-il passé ?


 Effectivement, on a entamé une grève de la faim, pour demander à toute la classe politique guinéenne, plus particulièrement les leaders, de se retrouver autour de la même table. Notre but était de les amener à trouver un accord consensuel qui puisse satisfaire toutes les parties, afin de préserver l’unité nationale, éviter qu’il y ait d’autres violences et maintenir la paix et la quiétude en Guinée. 

  Nous avons entamé la grève mercredi 28 octobre à 8h. C’est vers 23h que le commandant Thiégbro Camara (Ndlr : ministre de la Lutte anti-drogue et des Services spéciaux) et ses hommes sont venus nous arrêter et nous amener au camp Alpha Yaya Diallo. Quand ils sont arrivés, ils nous ont alignés. Ils nous ont amenés en dehors de la Maison des jeunes de Dixinn-Port où la grève se déroulait, pour demander aux jeunes qui étaient à côté s’ils nous connaissaient. Ces derniers ont répondu par la négative.

  Entre-temps, il y a eu certains soldats qui nous frappaient avec leur cross de fusil. Il leur a intimé l’ordre de ne pas nous frapper. Mais, il y a certains soldats qui ont continué. Sur le champ, il a demandé à ce qu’on désarme l’un des soldats. On nous a traités de terroristes en quelque sorte.

Selon eux, c’est une forme de terrorisme moderne, le fait d’avoir utilisé la grève de la faim. Ils nous ont conduits au camp Alpha Yaya où ils nous ont forcés à manger du pain et du corn bœuf. Ensuite, on nous a mis dans un conteneur. Une heure plus tard, ils sont revenus nous chercher pour un interrogatoire qui a duré presque toute la soirée.

Les questions de ces interrogatoires portaient sur quoi ?

En fait, on nous demandait qui nous finançait, qui était derrière notre mouvement, qui nous manipulait. Nous leur avons fait comprendre que depuis le début de nos activités au mois d’août 2007, nous nous autofinançons. Toutes les activités que nous organisons, le sont à partir des cotisations des membres.

 Nous avons décidé d’entamer la grève de la faim puisque nous avons des soucis par rapport à de nouvelles violences ici en Guinée. Violences qui pourraient conduire à une guerre civile. En tant que jeunes, nous souhaitions interpeler tous les leaders et la communauté internationale afin de nous aider à maintenir la paix et la quiétude en Guinée. C’est un mouvement de non-violence. On ne souhaite pas qu’il y ait encore des pertes en vie humaine. 

Est-ce que vous avez été aussi violentés au camp Alpha Yaya Diallo ?

 Une fois sur place, ils nous ont dépossédés de tout ce que nous avions. Ils ne nous ont pas brimés. Mais les interrogatoires n’étaient pas, du tout, tendres. Puisqu’ils insistaient sur des points pour nous pousser à dire des choses qui n’étaient pas correctes par rapport à notre mouvement.

Une fois de plus, c’est la conviction de toutes les personnes qui sont impliquées dans le mouvement, nous ne sommes derrière personne. Nous ne soutenons personne. Ce que nous voulons, c’est d’œuvrer pour maintenir la paix. C’est notre objectif et nous sommes disposés à faire tous les sacrifices pour arriver à ce résultat.

  Est-ce que vous avez pris soin d’informer la junte avant d’entamer la grève de la faim ?

Tout à fait. On a déposé une lettre pour le président de la République auprès du ministre secrétaire permanent du Cndd, d’autres lettres au ministère de la Défense, le chef d’Etat-major des Armées, le ministère de la Jeunesse. Il y a certaines personnes que nous avons informées oralement. Mais, on a pris les précautions de déposer une lettre auprès des «Forces vives». Puisque nous essayons d’interpeler tous les leaders, tout le monde était informé. Et nous pensions que c’est une action qui devait être soutenue.

  Combien de jeunes prenaient part au mouvement ?

Il y avait neuf personnes sur place. Mais au-delà des grévistes de la faim, il y avait toute une équipe pour nous aider en cas de problèmes. En tout, il y avait une cinquantaine de personnes. Tous les 9 ont été interpellés. Je tiens à préciser qu’ils ont été libérés le lendemain à 23h.

  La grève ayant été interrompue, qu’est-ce que vous prévoyez les prochains jours ?

 A ce stade, nous allons suspendre la grève de la faim. Mais en même temps, nous allons initier une campagne médiatique pour sensibiliser non seulement la population, mais tous les leaders, et faire passer notre message qui est celui de la non-violence.

Au-delà de la campagne médiatique, nous envisageons aussi d’envoyer une délégation à Ouagadougou pour rencontrer le médiateur de la Cedeao (Ndlr : le Président Blaise Compaoré du Burkina Faso), ainsi qu’à Abuja pour rencontrer le président en exercice de la Cedeao. Et éventuellement, envoyer une délégation à Addis-Abeba et à New-York. Nous allons utiliser tous les moyens pacifiques à notre disposition pour amener les parties autour de la même table et négocier un accord consensuel qui puisse préserver la paix. Nous espérons que les leaders politiques vont mettre leurs intérêts personnels de côté et penser à l’intérêt supérieur de la Guinée.

  Justement, toutes les parties impliquées dans cette crise sont à Ouagadougou depuis dimanche. Un commentaire ?

Nous espérons que toutes les parties vont négocier de bonne foi, afin de nous permettre d’avoir un accord le plus rapidement possible et de résoudre la crise actuelle. Afin qu’on puisse organiser les élections libres, transparentes et crédibles, et jeter les bases d’une nouvelle démocratie et d’un Etat de droit en Guinée

 


Source: LEQUOTIDIEN

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